Toukoul

Il suffit de passer la porte d'entrée du Toukoul pour être pleinement envahi par une ambiance chaleureuse et réconfortante. Le cadre, décoré par Serge Anton, est surprenant : larges planches de bois apposées au mur, objets typiques suspendus... Le tout mis en valeur avec un éclairage tamisé et intimiste. Bienvenue en Ethiopie!
 
Si vous n'avez (tout comme moi) jamais mangé Ethiopien et que votre connaissance de la cuisine africaine se résume au poulet 'moambe', vous risquez d'être un peu perdu en parcourant la carte. Heureusement, un petit lexique très utile est intégré en première page du menu et le personnel, souriant et très prévenant, est là pour vous aiguiller. Nous choisissons le menu 'Cornise' qui, paraît-il, est le plus épicé. Tant mieux, notre découverte n'en sera plus que totale. Pour accompagner le repas, nous optons pour un vin blanc du pays d'Oc, un chardonnay bio. Ce choix s'annonce judicieux: une minéralité et une belle longueur en bouche. La carte des vins affiche un rapport qualité prix très intéressant.
 
Avec les mises en bouche, le personnel nous présente gentiment une serviette pour se rincer les doigts. Le grand plateau en bois disposé sur la table le laisse supposer mais on nous le confirmera : en Ethiopie, on mange avec les doigts, à l'aide de l'injera, une galette de 'Tef' faisant office d'assiette et de couvert. Le menu est servi: épinards préparés façon saka saka, lentilles épicées, salade de choux et carotte au miel, pilons de poulet fermier, ayeb (yaourt caillé façon ricotta), bœuf aux échalotes et vin rouge et dés d'agneau aux tomates cerises et piments, dans des proportions généreuses. Une cuisine très riche en saveur, qui me rappelle un peu la cuisine indienne, de par ses épices puissantes, ses plats mijotés et ses accents sucrés. Le petit goût 'sûr' de l'injera rafraîchit le palais et équilibre le tout. J'aime aussi cette idée de mélange, que l'on prépare selon ses envies, sur l'injera. Chaque bouchée est différente et offre un nouveau ravissement aux papilles.
 
Haile Abebe, le maître des lieux, qui avait d'ailleurs lancé le Kokob à l'époque, nous explique que la plupart (si pas la quasi totalité) des épices et produits sont directement importés d'Ethiopie. "Nous avons fait le choix de respecter entièrement la culture éthiopienne. Nous n'avons donc nullement adapté notre cuisine au palais européen, si ce n'est pour l'injera, car la Tef est difficilement importable. Nous l'avons remplacé par du sarasin qui lui donne un goût moins sûret et une consistance moins spongieuse."
 
Passionné et enthousiaste, Haile nous parle avec ferveur de son pays et de sa culture. Il nous emmène en cuisine et nous présente ses produits et épices préférés : berberé, curcuma, mitmita… un festival d'odeurs les plus exotiques les unes des autres. Les sauces et ses bases, les pâtes épices, l'injera, le yaourt caillé… tout est préparé sur place avec un savoir-faire précis et minutieux. Haile, qui a d'ailleurs également développé toute une partie de la carte, y veille, dans la bonne humeur: "je suis extrêmement bien entouré. Un restaurant, c'est avant tout une équipe. "
 
Et cela se ressent, à tous les niveaux. Le Toukoul fut pour moi plus qu'une très belle découverte: un réel dépaysement. Un voyage à travers une culture autant conviviale que chaleureuse.
 
Florence Atlas Octobre 2012